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Focus sur le guide Vert Michelin

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Nous connaissons tous le guide Vert Michelin. Ce que l’on sait moins par contre, c’est que cette collection de guides de voyage n’est qu’un fait relativement récent dans l’histoire des guides Michelin et en fait pas nécessairement la première orientation vouée par Michelin.

L’introduction de Michelin dans le tourisme ne doit pas se comprendre comme une simple diversification de la société de pneumatique. Elle doit plutôt s’interpréter comme une logique permettant à l’origine à l’entreprise de créer de nouveaux débouchés pour écouler sa production. Tout autant, les activités de Michelin dans le secteur touristique s’inscrivent alors dans une vision globale de l’entreprise qui prône le progrès de la mobilité en assurant la liberté, le plaisir et la sécurité du déplacement.

Des guides fourre-tout

Si en 1900 sort le premier guide (Rouge) Michelin consacré à la France, il faudra attendre quatre années plus tard pour voir son confrère consacré à la Belgique, complété l’année d’après avec les Pays-Bas. Petit tant par sa taille que par son volume, il reprenait néanmoins plus de 300 localités belges, dont 10 étaient jointes d’un plan de ville. Malgré son hétérogénéité, « il contient, groupé dans un tout petit volume, ce qu’on ne peut avoir en général qu’en achetant trois ou quatre ouvrages différents et encore ! » (Guide, 1900 ; in par Karpik, 2000 : 372), des renseignements proprement touristiques n’y figuraient pas. Il s’agissait d’informations techniques utiles au voyageur automobile. Le guide de l’époque constituait donc un véritable « catalogue géographique » (Karpik, 2000 : 375) reprenant les éléments techniques permettant la réalisation du voyage. Dès lors, on y retrouvait les dépôts de pneus, les stations essence ainsi que les hôtels, importants à une époque où les déplacements étaient encore lents et que les villes étapes jouaient un rôle crucial dans les déplacements touristiques.

Bien qu’encore très incomplets et sans aucune indication de nature touristique, les premiers guides Michelin se caractérisent déjà par un élément neuf et distinctif des autres guides : le classement des villes par ordre alphabétique. Dès lors, le voyageur peut constituer son itinéraire à sa guise, par conjonction de différentes villes, tout en trouvant facilement les localités qu’il veut y intégrer. Le guide renseigne alors également les routes pittoresques et les routes ennuyeuses, celles étant indifférentes sont passées sous silence. Si aujourd’hui encore les routes pittoresques sont toujours mentionnées dans les guides Michelin, cette indication supplémentaire et totalement innovante permettra pour partie d’agrémenter le voyage de l’automobiliste entre ses différentes étapes.

En 1920-1922 paraissent les premières cartes Michelin sur la Belgique. C’est le début des références des guides vers ce produit, que l’on retrouve toujours dans les guides actuels. C’est également l’époque où les guides deviennent payants. C’est que Michelin souhaitait conserver une certaine forme d’indépendance sur ses produits, il remplaça dès lors la gratuité subventionnée par la publicité par l’achat par le consommateur.

Des guides de plus en plus touristiques : le guide Vert Michelin

Le premier quart de siècle d’existence des guides Michelin avait donc pour objectif essentiel de « supprimer l’imprévu dans la découverte de l’inconnu » (Karpik, 2000 : 377). Il faudra attendre 1930 pour que se marque l’entrée des premières informations touristiques, notamment sous la forme d’excursions à partir d’une localité de départ. On y retrouve des descriptions de sites touristiques, des itinéraires, des programmes de voyages, etc. Jusqu’à la parution des premiers guides Verts à la fin des années 1970, le guide est alors un guide mixte associant des informations pratiques et des informations culturelles et touristiques. C’est cette dernière évolution, avec l’incorporation croissante d’éléments touristiques, qui préludera donc la parution des premiers guides Verts. En effet, cette information devenant de plus en plus importante et représentant une part de plus en plus grande des guides Rouges, elle y sera par la suite extraite et regroupée dans un volume singulier : le guide Vert. Parallèlement, le guide Rouge évoluera vers un guide gastronomique. En 1978 sort la première édition du guide Vert Belgique – Grand-Duché de Luxembourg. L’année d’après parait la première du guide Vert Hollande.

Vers un retour aux sources ?

Le guide Vert est donc devenu un produit à part entière à côté du guide Rouge. Plus aucun élément d’ordre technique n’y figure, pour ne se concentrer que sur la description des localités et des sites touristiques. Mais si dans les guides des années ’70, mis à part quelques indications sommaires de repères géographiques, aucune information autre que celles de nature descriptive des sites touristiques ne se retrouvent dans les guides, on constate que dans les dernières éditions ceci n’est plus le cas. Si l’on remarque qu’une rubrique explicite « Se repérer » est apparue en introduction de chaque localité, le changement majeur est à voir en fin de chapitre de chaque localité. On y retrouve une série d’informations pratiques se déclinant sous plusieurs aspects : informations utiles, transports, visites, se loger, se restaurer, faire une pause, en soirée, sports et loisirs, achats, évènements.

Très clairement, cette nouvelle information de type pratique peut paraître étonnante dans le sens où elle constituerait une sorte de retour en arrière dans la mesure où les premiers guides Michelin avaient une fonction première de fournir des informations pratiques. On peut y voir sans doute la volonté de contrer de nouveaux concurrents apparus sur le marché des guides touristiques et qui sont tournés davantage vers le côté pratique du voyage (tels que le Routard ou Lonely Planet).

Comme le formule justement Francon (Francon, in Chabaud et al., 2000 : 115) : « c’est un véritable système complexe » qui s’est donc mis peu à peu en place, dès le début du XXe siècle, avec une série de produits (cartes, guide Rouge, guide Vert) complémentaires facilitant le voyage et le rendant sûr auprès des premiers voyageurs automobiles. D’ailleurs, posséder l’intégralité des produits semblent être une condition chez Michelin pour assurer la réussite d’un voyage : « Pour faciliter votre voyage, il [le guide Vert] est inséparable des autres publications Michelin : cartes et guide Rouge Benelux » (Guide Hollande, 1979 : préface).

Pour en savoir plus sur les guides Michelin

Chabaud G., Cohen E., Coquery N., Penez J. (éd.), « Les guides imprimés du XVIe au XXe siècle. Villes, paysages, voyages », Belin, 703 p.
Francon M., 2001, « Le Guide Vert Michelin, l’invention du tourisme populaire », coll. Economies et Sociétés contemporaines, 289 p.
Karpik L., 2000, « Le guide rouge Michelin », Sociologie du travail, Numéro 42, pp. 369 – 389.
Michelin, 2004, « La saga du guide Michelin. De 1900 à aujourd’hui, un formidable voyage à travers le temps », 285 p.

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